Parfois,

Le titre d’une série ou d’une photographie s’impose de lui même, presque contre mon gré. Cela peut arriver dès la prise de vue, mais d’ordinaire, c’est lorsque je commence à trier les photos que les mots surgissent et m’obsèdent. Considérant que cela fait partie du processus créatif, je leur accorde leur statut de titre, et les mots se tiennent alors tranquilles, me laissant travailler sur les images.

Le titre de cette série, “Il est inutile de suivre les chemins des rêves d’été ; aucun d’eux n’existe.” a deux sens, tout comme les chemins sur les photographies.

Vers l’extérieur d’abord, car il décrit le contenu des images. Les photographies ont été réalisées en été, et elles montrent des chemins qui n’existent pas. En effet, pour réaliser la douzaine de photographies qui constitue le coeur de la série, j’ai utilisé la technique de la surimpression, directement à la prise de vue. Me tenant au milieu d’un chemin, perdu au milieu de la campagne du sud de la France, je photographiais tour à tour les deux directions qui s’offraient à moi. Devant et derrière.

L’image qui apparaissait alors me fascinait. Reflet irréel de la réalité où passé et futur se mélangent pour représenter le présent. Le chemin qui est donné à voir n’existe pas en tant que tel, et pourtant c’est ce chemin qui devient, en tant que notion, le sujet de la photographie.

Pour moi, la photographie est indissociable de la promenade, de la flânerie. En ville ou dans la nature, c’est quand je marche seul et sans but, laissant mon esprit vagabonder, et suivant tour à tour mes sens ou mon intuition, que je peux vraiment faire des photos. Je pourrais utiliser tout le champ lexical de l’errance et du cheminement pour décrire ma manière de faire de la photographie.

Pour en revenir à cete série, lors de mes promenades solitaires sur ces chemins qui n’existent pas, mes pas me menaient souvent jusqu’à une petite chapelle entourée par son cimetière. Un batiment perdu entre vigne et forêt, figé dans le temps comme une photographie. C’est à cet endroit que j’ai réalisé les autres images, toutes en surimpression également, qui complètent cette série.

En poussant l’idée de cheminement vers sa dimension symbolique, religieuse, j’ai appliqué le même principe que précedemment, en combinant une image de la terre avec ses pierres tombales, et une image du ciel.

Le titre de la série se dirige aussi vers l’intérieur, pour parler de moi autant que du sujet des photographies elles-mêmes. Il dévoile une vision négative du monde, une désillusion qui décrit l’état d’esprit qui était le mien au moment de prendre ces photos.

Une désillusion amoureuse, vécue au cours de cette même semaine de vacances. Un rêve d’été qui ne se réaliserait jamais.

No man’s land